Ecole Camille Claudel – Marie Colonville : « Quand on veut, on peut ! »

Rencontre entre notre classe de CM1/CM2 de Camille Claudel et une athlète de haut niveau. Marie Collonvillé, à 47 ans, a échangé avec nous sur sa carrière bien remplie : Championnats du monde, d’Europe ou encore jeux Olympiques. Elle nous raconte son parcours et revient sur sa volonté de faire changer les choses au niveau de l’égalité entre hommes et femmes dans le sport.

C’est en CM2 lors d’une rencontre entre écoles dans un stade que Marie Collonvillé a découvert le saut en hauteur, et elle s’est dit que c’était ça qu’elle voulait faire. Donc arrivée en sixième, elle s’est inscrite dans un club d’athlétisme, l’Amiens Université Club, qu’elle ne quittera jamais. « J’aimais faire de tout , nous dit Marie. En catégorie benjamine, on nous fait pratiquer toutes les disciplines de l’athlétisme, et donc les épreuves combinées ». Elle a ainsi découvert les sept épreuves de l’heptathlon, sa discipline, qui se déroulent sur deux jours. Jour 1 : 100 mètres haies, saut en hauteur, lancer du poids et 200 mètres. Jour 2 : saut en longueur, javelot, et pour finir le 800 mètres.

Ses épreuves préférées étaient celles de saut , et surtout la hauteur. En effet, malgré son gabarit (1m63), elle a un record à 1m94 ! En revanche les épreuves de lancer n’étaient pas son fort. Mais grâce à de longues heures d’entraînement en plus de ses études, elle arrive à progresser physiquement et techniquement et à obtenir le statut d’athlète de haut niveau. « A l’époque, je disais que j’étais à 35 heures sur la piste, plus les temps de récupération à côté, ce qui veut dire que je m’entraînais matin et soir, toute la semaine ».

Elle décroche ainsi plusieurs podiums aux championnats de France, participe à 6 championnats du monde (avec une 3e place à Birmingham en salle en 2003) et 2 championnats d’Europe. Elle signera également une 7e place aux Jeux Olympiques d’Athènes en 2004 et une 12e place à Pékin en 2008 malgré une meilleure performance. Au cours de cette belle carrière, elle n’aura qu’un seul regret : avoir manqué les championnats du monde à Paris en 2003.
« Après mon podium à Birmingham à l’hiver 2003, je me suis cassé le péroné au mois d’avril en tombant sur les haies à l’entraînement. Malgré une bonne rééducation, je n’ai réussi que les minimas B en juillet, mais ce n’était pas suffisant pour être qualifiée aux championnats du monde ».

Quand on lui demande si elle aurait voulu faire un autre métier, Marie nous arrête tout de suite. « Même si je n’ai fait que ça entre 2003 et 2009, ça n’était pas un métier pour moi, l’athlétisme et la compétition, c’est une passion, c’était une vraie chance de pouvoir faire ça ». Elle nous parle également des capacités mentales et morales pour arriver au plus haut niveau et y rester aussi longtemps. « C’est indispensable pour un athlète. On peut être très fort physiquement, mais ne pas avoir le mental pour faire des compétitions, pour essayer d’être toujours le meilleur, et de se perfectionner, et moi j’ai cette caractéristique d’être perfectionniste, d’avoir la volonté de beaucoup m’entraîner pour trouver le geste juste, pour sauter le mieux possible, et même dans tout ce que je fais, pas seulement en athlétisme. Quand on est motivé, quand on a envie de le faire, c’est avec la tête que ça marche, et ça, ça fonctionne pour tout, le sport, la musique, mais aussi à l’école. » Nous lui parlons ensuite de la différence entre le nombre d’épreuves combinées pour les hommes et celui des femmes. La réponse de Marie : « les raisons sont d’abord historiques, mais les femmes peuvent également faire du décathlon. J’ai même fait le premier record du monde féminin au décathlon ( 8150 point au décathlon de Talence, record homologué en 2005). Mais si on revient sur la place des femmes dans le sport, on peut dire qu’elles n’ont pas beaucoup de place, elles commencent à en prendre un petit peu, mais c’est dur, il ne faut pas oublier qu’au temps du baron de Coubertin et des débuts des Jeux Olympiques modernes, ce qui n’est pas si vieux que ça, il n’y avait pas de sport pour les femmes. Elles ont eu progressivement le droit de faire de plus en plus d’épreuves, et notamment en épreuves combinées, où on est passé de 4 épreuves (quadrathlon) à 5 épreuves (pentathlon), puis à 7 (heptathlon). Depuis une vingtaine d’années, on parle de décathlon féminin, ça existe un peu, mais pour en faire dans des championnats, ça freine encore du côté de ces messieurs… »

Marie nous apprend également que dans certaines disciplines, comme le marathon, certaines athlètes devaient se déguiser pour courir avec les hommes, et que de grandes championnes comme Chantal Langlacé (une amiénoise, comme Marie) devaient courir dans les championnats masculins car il n’y en avait pas pour les femmes. Elle parle de son regret de ne pas avoir pu pratiquer le saut à la perche en compétition (même si actuellement cela serait possible), car cela n’était pas autorisé à son époque. D’autres exemples suivent : triple saut, lancer de marteau,… sont restées longtemps des disciplines uniquement masculines. « Le jour de mon record du monde de décathlon, certains athlètes, notamment des tchèques, se moquaient de moi, me disaient que je serais mieux dans une cuisine… et puis quand j’ai fait mon record, ils sont venus me dire que c’était une vraie performance de faire 8150 points ». Marie a continué de se battre pour faire accepter le décathlon féminin, qu’elle trouve « beaucoup plus intéressant car il y a plus d’épreuves, avec un lancer en plus, du saut à la perche, et un 1500 mètres qui permet d’avoir du sprint jusqu’au demi-fond ».

Jusqu’à un échange avec un responsable de la fédération internationale. « Il m’a dit : « Oui, mais en Afrique, les filles ne vont pas pouvoir sauter à la perche ! »… Et les hommes, ils font comment ? »
A méditer…



Les élèves de CM1/CM2 de l’école Camille Claudel

Crédits Photos : GazetteSports

1 Comment

Leave a Comment

Your email address will not be published.

Start typing and press Enter to search