BÉNÉVOLAT – Nordine Khelif : « Cela demande de l’organisation »
Joueur au sein du groupe N3 en plus d’être bénévole, à l’AC Amiens, Nordine Khelif a un emploi du temps bien rempli. Mais il y a toujours moyen de s’arranger lorsque l’on est motivé.
Pour Nordine Khelif, l’aventure bénévolat commence en 2018. À l’époque, « j’étais joueur de l’équipe réserve avec Benoît Sturbois, nous raconte-t-il. Le club a proposé à deux joueurs dont moi de reprendre les équipes de jeunes parce qu’ils avaient besoin d’éducateurs pour encadrer les U9. » Sans grande hésitation, il accepte. Depuis lors, il n’a « pas lâché » et s’est imposé dans l’équipe encadrante du club : « Je me permets de solliciter les éducateurs pour donner des informations, pour créer du lien, j’essaie de faire ça. J’ai mis en place des groupes pour chaque catégorie en jeune, j’ai une traçabilité, un suivi, je trouve ça intéressant. »
Un programme chargé, une organisation huilée
Pourtant, ce n’est pas forcément gagné. Car être bénévole, cela prend du temps, notamment lorsque l’on encadre une équipe. Aujourd’hui auprès des U13 de l’AC Amiens, Nordine Khelif est en effet pris pour les entraînements le mercredi et le vendredi. Le mercredi, il est même présent dès 13h, pour une séance de son équipe qui ne débute pourtant qu’à 14h30, afin d’« aider dans l’organisation, dans la préparation des entraînements. » Et quitte Carpentier à 16h30. À cela s’ajoutent également les matchs le samedi. Et quand il n’y a pas match, pas de repos pour les braves, puisque de 10h à 12h, lui et son équipe disposent du gymnase Carpentier pour « une opposition entre eux, au futsal » qui « permet de travailler différemment ».
Un engagement déjà important mais qui l’est encore plus quand on sait que le jeune homme de 24 ans est déjà bien occupé par ailleurs. Étudiant, il travaille à côté et est également joueur à l’AC Amiens, au sein du groupe N3. Ainsi, c’est pas moins de 4 entraînements dans la semaine qui viennent s’ajouter, ainsi qu’une séance à la salle de muscu. Un programme auquel il faut ajouter le match du week-end, le plus souvent avec la B, en R2, le dimanche. Un planning « assez conséquent », concède celui qui évolue au poste d’avant-centre.
Alors, comment accorder autant de temps à son club dans une semaine ? « Sur le plan personnel, j’ai un emploi qui me permet d’être libre les mercredis après-midi et les samedis », nous explique Nordine Khelif. Pour autant, reconnait-il, « cela demande de l’organisation. » Mais si « c’est très compliqué », quand « on est organisé et qu’on aime ce qu’on fait en tant que bénévole, on peut trouver une solution. » Ainsi, détaille-t-il, « avant de reprendre en septembre, j’ai tout calé, je me suis organisé, il faut se poser et mettre tout en ordre. Je sais quelles sont les dates de mes cours, de mon travail, je connais les horaires d’entraînement. Par exemple, le mercredi après-midi, dès que j’ai fini, à 16h30, je sais que j’ai un cours à 17h, ça ne me met pas en difficulté parce que j’ai planifié l’entraînement à telle heure. Par contre, on ne peut pas me demander quoi que ce soit à 17h, on ne peut pas m’en demander plus, parce que j’ai été clair. »
Transmettre son expérience
Mais comme il le souligne lui-même, faire de tels efforts nécessite d’aimer ce que l’on fait, d’y trouver une réelle motivation. Chez lui, elle prend deux formes, qui se complètent. D’une part, il s’agit de faire profiter de ce qu’il a lui-même appris. Lorsque l’on en discute avec lui, l’idée de transmission est ainsi très présente dans son propos : « Ce qu’on a appris depuis que l’on joue au foot jusqu’à maintenant en N3, on peut le transmettre. Nous, avec Nadir (Ettaibi, autre joueur du groupe N3 qui entraîne les U13 avec lui, ndlr), on sait que ce qu’on fait en catégorie senior, ou même quand on était en U19, DH, ce qu’on a emmagasiné, que ce soit sur le plan technique, tactique ou de la réflexion, on a la possibilité de le transmettre. »
Ce qu’on a appris depuis que l’on joue au foot jusqu’à maintenant en N3, on peut le transmettre.
Par ailleurs, s’il reste encore un jeune joueur, il estime que cette expérience qu’il a déjà permet également d’« être crédible face au groupe avec lequel on travaille. » Ainsi, si c’est une charge pour lui et ses équipiers concernés, il juge le fait de faire appel à des joueurs du groupe N3 « assez malin » de la part de son club. En effet, même s’il précise qu’à ses yeux, ce n’est pas parce que « quelqu’un n’est pas footballeur qu’il ne peut pas apprendre correctement », l’atout de cette stratégie est que « si on doit leur apprendre à se déplacer, par exemple, on peut leur montrer et ils vont pouvoir se dire « ah oui, il se déplace correctement, il demande dans le bon intervalle ». » Convaincu que l’exemple est une force pour amener les jeunes dans son sillage.
Permettre aux jeunes de s’exprimer pleinement
Mais son expérience personnelle joue un autre rôle dans son envie de s’impliquer auprès des jeunes joueurs de son club. « Ma vraie motivation, nous dit-il, c’est que moi, j’ai pris énormément de temps pour évoluer, pour progresser, pour apprendre les bonnes bases. J’ai vraiment appris correctement à partir de ma première année senior, avec Benoît Sturbois. C’est là où j’ai commencé à apprendre à me déplacer correctement, à demander le ballon correctement. C’est dommage, j’ai perdu énormément de temps pour apprendre le plus important dans le football. » Sous-entendu, il ne veut pas que pareille mésaventure arrive à d’autres jeunes après lui.
Un point de vue qu’il explicite quand il affirme que son rôle est aussi de « transmettre les bases pour que, quand ils arrivent en U18-U19, les jeunes qui ne sont pas en centre de formation ne soient pas en retard » par rapport à ceux qui en fréquente un. Par ailleurs, avant même ce stade, « je veux qu’ils évoluent, poursuit-il, et faire le maximum, s’ils aiment le foot, pour qu’ils soient à un niveau correct si dans un ou deux ans, les parents décident de faire des tests, qu’ils aient le niveau et ne soient pas en retard. C’est une motivation que j’ai depuis le début. »
Aussi, il regrette que dans certains cas, « on ne va pas les pousser à la réussite mais les laisser stagner à un niveau normal pour ne pas qu’ils partent. Et ça, je trouve ça injuste à partir du moment où l’on voit un jeune qui se débrouille bien, de ne pas l’accompagner pour qu’il puisse s’épanouir davantage. On veut garder le jeune jusqu’aux catégories seniors parce qu’on sait que c’est un bon joueur donc on va le chouchouter pour qu’il n’évolue pas. » Estimant que certains éducateurs qu’il a connu plus jeune lui ont « mis des bâtons dans les roues », il entend de son côté « que les éducateurs accompagnent et suivent afin de permettre aux jeunes de réussir dans le milieu du football. On sait que c’est très dur mais si les éducateurs apportent leur aide, ça peut être une force. »
Qu’importe donc les contraintes, puisque c’est bien ici une vraie vocation qui anime Nordine Khelif, qui en profite pour souligner le soutien dont il bénéficie au sein de son club de la part « du président et du secrétaire, Jean (Kolus, ndlr), qui m’aident beaucoup, ils font un travail formidable sur le plan de l’organisation. »
Morgan Chaumier
Crédit photo : Reynald Valleron – Gazettesports