ÉDUCATION AUX MÉDIAS : Rame, rameur, rameuse…
Érika Sauzeau, médaillée de bronze de para-aviron aux Jeux paralympiques de Tokyo, a rencontré notre classe de CM2 d’Ailly-sur-Noye et nous l’avons interviewée. L’athlète nous a raconté son parcours, d’Amiens jusqu’aux derniers Jeux de Tokyo.
Vers la pratique de l’aviron
Érika Sauzeau pratiquait le basket fauteuil et le tennis fauteuil. Membre de l’Armée des Champions comme l’athlète de l’Amiens UC Redouane Hennouni Bouzidi, elle a été repérée par la Fédération Française d’Aviron lors de tests de détection multisports nationaux qui s’appellent « La Relève ». Par téléphone, des sélectionneurs lui ont proposé de remplacer une rameuse qui partait à la retraite. Cette athlète passionnée s’est alors interrogée car elle devrait utiliser sa jambe gauche alors qu’au basket fauteuil et au tennis fauteuil, elle ne l’utilisait pas. Érika s’est dit : « Si j’ai trop froid, ou que j’ai mal à ma jambe gauche, j’arrête l’aviron et de toute façon je n’ai rien à perdre. » Elle s’est entraînée pour la toute première fois sur un rameur en salle, un ergomètre, c’est ce que l’on appelle de « l’aviron indoor ».
Érika Sauzeau aime ramer sur la Somme. Cette championne paralympique a fait de l’aviron de mer et a aimé cette pratique mais elle a été « désarçonnée » par le type d’embarcation. Pour s’entraîner, elle fait de la natation trois fois par semaine, du vélo en intérieur ou sur route et beaucoup de musculation : « j’adore ça ». L’athlète continuera l’aviron dans les années à venir. Elle s’entraîne actuellement pour participer aux Jeux Paralympiques de Paris 2024. Elle fait partie de la catégorie PR3 MIX 4+. Cette catégorie se pratique en équipe mixte de deux femmes et deux hommes, ainsi qu’un barreur.
Voyage vers les Jeux
Érika Sauzeau a participé à ses premiers Jeux Paralympiques à Tokyo, l’an dernier (NDLR : à 39 ans). Lors de son arrivée à l’aéroport, Érika et son équipe ont été accueillies « dans de très bonnes conditions ». Cependant, les sportifs paralympiques ont attendu cinq heures pour obtenir leur accréditation. Cela paraît beaucoup mais les athlètes olympiques français ont attendu jusqu’à douze heures !
Les officiers japonais ont vérifié son passeport, pris ses empreintes palmaires (NDLR : de la main) et lui ont fait un scanner rétinien. Érika a également dû réaliser un test Covid. Elle est sortie avec son accréditation où il y avait un code-barres contenant toute son identité. Dans ce badge, il y a une balise GPS pour suivre les déplacements. Les autorités japonaises surveillaient les athlètes car ils ne devait pas sortir du périmètre imposé. Elle avait également besoin de son accréditation pour accéder à la cantine et aux différentes infrastructures du village paralympique.
Ambiance au village
Quand elle est arrivée au village olympique, des mesures sanitaires étaient à respecter pour lutter contre l’épidémie de Covid-19. Elle devait se faire tester tous les matins, pour vérifier qu’elle n’était pas contaminée. Ces tests étaient importants et stressants car si un athlète du groupe était détecté positif, les équipes étaient mises à l’isolement et ne participaient plus aux Jeux. Avant leur voyage à Tokyo, les coachs avaient prévenu les prétendants de ne pas se laisser distraire par l’ambiance et l’environnement du village olympique. Ils les ont encouragés à rester dans leur bulle pour bien préparer leur passage.
Quand l’athlète est arrivée, elle s’attendait à avoir un effet « waouh » par rapport à ce que d’anciens sportifs lui avaient raconté à propos de leur expérience olympique : « Vous rentrez au village, en gros, c’est Disneyland ! Il y a plein de choses à voir, c’est joli, il y a plein d’athlètes, des animations etc. donc je m’attendais à prendre un waouh […] » Malheureusement, avec la pandémie et les mesures de sécurité, elle n’a « pas eu cet effet « waouh ». […] Hélas, il n’y avait pas vraiment d’ambiance à cause du Covid. »
Au village, il y avait des bâtiments, des allées avec plein de drapeaux, une grande salle de sport, des logements et un immense lieu de restauration. Sa description nous a impressionnés : « La restauration là-bas, c’est un peu comme un hypermarché à deux étages, ouvert 7j/7 24h/24 et vous avez toute la restauration du monde, puisqu’il y a des athlètes du monde entier. » Cependant, pas question de céder à la tentation, il fallait s’en tenir aux menus mis en place avec son nutritionniste pour bien performer !
Mascottes et partage avec les bénévoles
Pour les Jeux de Tokyo, il y avait deux mascottes : Someity et Miraitowa. Someity, rose, était la mascotte des Jeux Paralympiques. Miraitowa, bleue, était la mascotte des Jeux Olympiques. Érika Sauzeau nous a présenté une mascotte particulière, accrochée au bouquet de fleurs que la championne a reçu quand elle a été médaillée. Sa Someity est en bronze : « elle est collector, on ne peut pas la trouver dans le commerce, il faut forcément être médaillé aux Jeux pour avoir Someity de la même couleur que votre médaille », nous a expliqué Érika.
Après la remise des médailles, la championne paralympique et son barreur ont fait une check-list de ce qu’ils voulaient faire avant de partir du village, « quitte à ne pas dormir.» Ils ont décidé d’offrir leurs bouquets à des Japonaises d’un atelier d’origami, car les bénévoles « vivaient les Jeux, eux, de l’extérieur » et « n’avaient pas de vue du tout sur les athlètes en train de performer. » Ce fut un moment intense de partage entre les athlètes et les bénévoles : « je vous assure que l’émotion transmise était énorme, ces deux femmes étaient en pleurs d’avoir un cadeau… » Les bénévoles étaient émus : « quand j’ai présenté la médaille, j’ai eu cinquante Japonais autour de moi, ils n’en avaient jamais touchée, ils avaient la chair de poule. » Et enfin, à cet atelier, Érika Sauzeau, qui voulait simplement apprendre à faire une cocotte en papier, a réalisé une tour Eiffel ! « Mais j’ai appris à faire les cocottes » nous a-t-elle confié !
La médaille de bronze des Jeux Paralympiques
La médaille d’Erika Sauzeau est 100% bronze et pèse 493 grammes. Elle est faite à partir de composants de téléphones portables donnés par les Japonais, ce qui en fait une médaille 100% recyclée. Pour Érika Sauzeau, « cette médaille est très jolie, plus belle que les médailles olympiques. » Elle a été créée spécifiquement pour les Jeux Paralympiques et elle est beaucoup plus détaillée que celles des JO. Recto : des éléments naturels importants pour les Japonais sont gravés : l’eau, les fleurs, les feuilles, les roches et le bois. Au verso de la médaille est gravé un éventail car cet objet est emblématique du Japon. Contrairement à la médaille des JO, elle est adaptée aux malvoyants. Sur l’éventail gravé ainsi que sur le cordon de la médaille, il y a des inscriptions en braille. Parce qu’elle ne sait pas lire le braille, l’Amiénoise a fait vérifier sa médaille : « j’ai des amis qui sont non-voyants, j’ai testé la médaille parce que je me suis dit, on peut me dire n’importe quoi ». En lisant les écritures, son ami a constaté qu’il y avait une coquille. Il lui a dit, après avoir lu « Ah ! C’est marrant, ils n’ont pas mis de T majuscule à Tokyo. » Érika a donc appris que « c’est écrit tokyo 2020 tout en minuscules. »
Sur la tranche de la médaille est gravée « PR3 barré mix », ce qui veut dire qu’Érika Sauzeau a participé à cette épreuve. On retrouve aussi trois points en relief qui correspondent à la troisième marche du podium paralympique. Pour protéger la médaille et la présenter, elle est rangée dans un coffret aimanté qui est fabriqué dans un bois précieux du Japon : le frêne.
Remerciements
Nous remercions Érika Sauzeau d’être venue échanger avec nous et de nous avoir invités à sa tentative de record du monde. Nous sommes heureux d’avoir ramé à ses côtés et d’avoir vu la Samarienne pulvériser le record du monde en 43 min 17 sec ! Nous remercions également Léandre Leber, journaliste et fondateur de Gazette Sports, de nous avoir présenté son métier et de nous avoir aidé à rédiger cet article.
Emma, Léane, Emma, Elias, Lou-Anne, Lily, Arthur, Lucas, Pacô, Noah, Célia, Léa, Angeline, Lou, Ysaline, Titouan, Maxence, Samuel et Faustine, élèves de la classe de CM2 de Noémie Konen à Ailly-sur-Noye.
Crédit photos : Léandre Leber – Gazette Sports