PORTRAIT : KAMIL BOUSSELHAM FAIT LE BREAK !

Issu d’Étouvie, quartier d’Amiens, Kamil Bousselham est un célèbre breakdanceur amiénois. Tantôt professeur, compétiteur et performeur, Kamil est en lice pour participer à la première épreuve de breakdance de l’histoire des Jeux Olympiques.

Pour la première fois de leur histoire, les Jeux Olympiques accueilleront une épreuve de breakdance. Danse de rue, la discipline offre à voir des enchaînements de figures acrobatiques très impressionnantes. Populaire auprès des jeunes du monde entier, le breakdance a récemment gagné le droit d’entrer aux JO et ce sera à Paris, en 2024. Preuve que cette pratique, qui prend racine dans le Bronx des années 1970 et qui a longtemps été victime du cliché de phénomène de banlieue, est en train de s’imposer comme discipline légitime aux yeux des institutions sportives.


Rencontre avec Kamil Bousselham, B-boy (danseur de breakdance) amiénois au parcours atypique, pressenti pour participer aux épreuves olympiques de Paris 2024.

Un enfant d’Amiens qui lui rend bien

Kamil est un gosse d’Amiens, du quartier Étouvie auquel il reste très attaché. D’abord passionné de boxe française, suivant les cours de Mohammed Oudji, c’est dans la danse hip-hop qu’il trouvera finalement sa liberté d’expression artistique et sportive, au début des années 2000. Et c’est à travers le visionnage d’un film, « Le Défi », qu’il fera sa première rencontre avec le breakdance. « C’est un film français très peu connu, qui raconte les aventures d’un jeune B-boy. C’est vraiment parti de rien. On a regardé le film avec des amis et on est sorti pour tenter de reproduire les figures. Ça a commencé comme ça… »

Se tourner vers la danse n’était pourtant pas une évidence pour le jeune Amiénois : « c’était pas un truc de mec, donc c’était hors de question. Je viens d’un quartier, je viens d’Étouvie… Je venais de la boxe, ce ne sont pas les mêmes codes, je pensais vraiment que ce n’était pas fait pour moi. » Les stéréotypes ont la vie dure, mais non, la danse ce n’est pas que pour les filles et ça, Kamil l’a bien compris. Aujourd’hui, il est l’un des meilleurs breakeurs de France et une figure de premier plan du monde de la danse amiénoise. Il a participé activement à la démocratisation de la pratique breakdance dans la cité picarde, il transmet notamment son savoir aux élèves du studio Anne Coury. « Je travaille dans les secteurs nord, sud, celui d’Étouvie et en centre-ville avec le studio de Danse Anne Coury. Je fais partie de ces gens qui sont fiers de leur ville. J’ai toujours pu bénéficier de son soutien, elle me supporte dans tous mes projets, je ne me verrais pas vivre ailleurs. »


Breakdance expérimental

Le breakdance est une danse riche, qui laisse une liberté incroyable à celui ou celle qui la pratique. Une liberté qui vient du métissage des genres, qui a fait ce que le break est aujourd’hui et qui lui procure une dimension universelle. « C’est une discipline ultra complète, parce que ça vient du kung fu, de la capoeira, de la gym… Il y a énormément d’influences. C’est une danse qui laisse une telle liberté que tout le monde peut la pratiquer. Elle fait partie intégrante de la culture hip-hop, dans laquelle il y a toute une multitude d’autres danses. Il y a le popping, le hustler, le locking, la house… C’est comme si on parlait d’instruments à cordes : guitare, violon, violoncelle… En province, ils ne se prennent pas la tête, quand ils proposent des cours de breakdance, ils appellent cela hip-hop. »

Si le breakdance est une discipline sportive, c’est également un art et Kamil en est un avant-gardiste, un expérimentateur qui accompagne son avancée artistique. Cet automne, il s’est produit au Festival de Saint-Riquier, avec son comparse Benjamin Paget. Le duo a proposé un spectacle expérimental, loin de la recherche de performance pure que nous laisse à voir traditionnellement le breakdance. Un spectacle dans lequel ils racontent, avec la seule expression de leurs corps, leur rencontre fortuite lors d’un championnat du monde à Liège, point de départ de la formation d’un duo prolifique. « Avant tout, on raconte une rencontre humaine. Même si le public n’a pas les codes du break, il peut comprendre notre récit. » Les deux artistes ont su captiver et atteindre au cœur un public de non initiés. « C’est encore plus intéressant s’ils ne sont pas connaisseurs, car si on arrive à leur faire comprendre, on a gagné. Les codes break, on les montre, mais on les déconstruit. » Kamil, créateur de passerelle entre la rue et les lieux artistiques dits « légitimes ».

Objectif Jeux olympiques 2024


Depuis des années, l’Amiénois écume les battles et les championnats à travers le monde, il a transcendé sa condition et ces fameux clichés pour être aujourd’hui multimédaillé, champion du monde (2006 et 2011) et dans la course aux Jeux Olympiques 2024. « C’est une très bonne chose que le break entre aux JO. Ça met en lumière cette pratique. La plupart des breakers ont du mal à en vivre, il n’y avait pas de sponsors, pas de partenaires… Mais depuis l’annonce de l’entrée aux JO, toutes les grandes marques sont devenues sponsors, les choses avancent » se réjouit-il. Si Kamil espère participer à cette prestigieuse compétition, il mise également beaucoup sur ses élèves.

« Pour les plus compétiteurs, je vise les Jeux. J’adorerais, ça serait incroyable ! » Passée de pratique obscure, mise au ban, à discipline légitime qui a toute sa place aux Jeux Olympiques, le breakdance a eu besoin d’acteurs dévoués et passionnés comme Kamil Bousselham pour en arriver là aujourd’hui.
En attendant de, peut-être, rejoindre la piste de danse place de la Concorde, qui accueillera les épreuves de
break, Kamil continue de transmettre son savoir et de faire vivre l’art qui donne un sens à sa vie.

Les épreuves de breakdance aux JO seront divisées en deux : une masculine et une féminine. Chacune d’entre elles verra 16 B-Boys et 16 B-Girls s’affronter dans des battles 1v1. Les compétiteurs devront enchaîner les powermoves (mouvements de danse définis) en improvisant sur le son du DJ, pour séduire les juges et remporter titres et médailles olympiques.

Rédaction : Ryad Hammoud
Crédit photo : LL – VYM

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