PORTRAIT : Loïc Lovicourt, au septième ciel
Entre la voltige et le contrôle aérien, le quarantenaire ne vit que pour les airs. Portrait d’un homme plein d’ambition, à la carrière qui s’envole.
« J’ai toujours un attachement avec la Somme« . Cette région, Loïc Lovicourt la découvre en 2008 en tant que contrôleur aérien dans le tout nouvel aéroport d’Albert. Mais avant, le pilote vit une enfance remplie de voyages. Né à Cherbourg, le jeune Loïc déménage au Havre à l’âge de six mois. Son père, militaire, est contraint de se déplacer régulièrement. Exit la France, sa famille pose ses valises en Allemagne, durant 5 ans à Berlin, côté ouest. « J’étais dans une école française. C’était assez sympa parce qu’il y avait une certaine mixité. Il y avait des Allemands, beaucoup de Français, et aussi des enfants de diplomates de pays francophones. Je me souviens, il y avait 4 ou 5 élèves dans ma classe qui étaient enfants de diplomates, mais dont l’ambassade était à Berlin-Est. Et tous les jours, ils passaient le mur. C’était pas mal d’expériences aussi parce qu’on discutait avec eux de comment la ville de l’autre côté« , raconte-t-il.
Loïc Lovicourt voit le mur de Berlin tomber en 1989. Après un passage à Baden-Baden, l’adolescent découvre Clermont-Ferrand, puis Bourgoin-Jallieu. Avant d’intégrer un internat militaire, à Autun, en Bourgogne. « C’était un collège comme un autre, sauf qu’on dormait sur place et qu’on était habillés en treillis« , plaisante-t-il. Le jeune homme y apprend la rigueur. Entre lits au carré, nettoyage des salles communes, cours, ses journées sont chargées. Lorsque l’étudiant retrouve son père, son éducation est différente : « Quand j’étais à la maison, c’était plutôt cool. Il m’a donné envie de lire beaucoup, de m’intéresser à plein de choses. C’est quelqu’un d’assez cultivé. Il ne m’a pas forcé à être militaire, par exemple. Après, c’était une éducation que j’estime être standard, ni trop rigoriste, ni trop laxiste« .
De la découverte de l’aviation…
A la fin de l’internat, le néo bachelier rejoint l’île de la Réunion pour six années, où son père est muté. Une « super expérience » selon lui : « J’ai commencé à travailler au début. J’avais toujours envie d’apprendre des choses. J’ai passé mon permis de moto, j’ai passé mon brevet de pilote. J’ai appris à plonger, j’ai découvert Madagascar, l’île Maurice, puisque c’est à côté. Et puis, c’est un département qui est super parce qu’on s’y sent bien« . C’est à ce moment que Loïc Lovicourt se lance dans l’aviation, passion qu’il avait découverte en admirant des avions de chasse dans une base militaire américaine en Allemagne. « C’est toujours resté dans un coin de ma tête« , avoue-t-il.
Après l’obtention de son brevet à 23 ans, le vingtenaire débute directement par la voltige, grâce à un instructeur « assez fou » pour l’accepter dans la discipline. En parallèle, le jeune homme exerce le métier de technicien cordiste. Puis, un de ses collègues voltigeurs lui parle du concours de l’aviation civile. Concours qu’il décroche et qui l’emmène à l’ENAC de Toulouse, afin de devenir contrôleur aérien. Suite à ses nouvelles études, « les postes de contrôle, il y en avait quelques-uns mais plutôt au-dessus de la Loire. Dans ma promotion, il y avait des postes au Havre, en région parisienne. Je voulais éviter la région parisienne parce que c’est un rythme qui ne m’allait pas. Je pouvais aller à côté de Reims, à Albert ou à Merville. J’ai décidé d’aller à Albert parce que le terrain s’ouvrait à ce moment-là. Je trouvais que c’était quelque chose que je ne ferais pas deux fois dans ma carrière, un terrain tout neuf« .
… à la voltige de haut niveau
C’est en 2006 que Loïc Lovicourt se lance en compétition. Dans un premier temps en plus petit niveau, avant d’entrer à l’ENAC. « J’ai arrêté pendant le temps de mes études et j’ai repris en 2009 avec Amiens« , confie-t-il. Trois années s’écoulent dans le club d’Amiens Voltige, avant de rejoindre Caen, avec une machine plus puissante, durant un an. Le voltigeur retrouve Amiens l’année suivante. Et enfin, en 2015, direction la Vendée. Lors des championnats, le pilote progresse au fil du temps. Et c’est en 2016, en Pologne, que sa carrière fait un énorme bond en avant. Le Cherbourgeois devient champion du monde dans la catégorie Advanced (où les figures sont plus simples qu’en Unlimited, catégorie reine, ndlr). « Je me suis retenu de crier. Le deuxième, c’était un Français aussi. Ça se jouait entre nous deux. Dans ma tête, j’étais content, je n’y croyais pas beaucoup. C’était quand même un aboutissement. J’ai appelé ma compagne pour lui dire que j’avais gagné parce qu’elle n’avait pas encore le résultat. Elle était très heureuse. On a pleuré. C’est une fierté parce qu’on représente la France. On sait que les pilotes qui sont là sont plutôt bons. Ça veut dire qu’on a été bons aussi. Obtenir un titre international sans avoir eu de titre national, c’est quand même un bel exploit« .
En 2017, le voltigeur français remporte un nouveau titre, celui de l’Open de France, cette fois dans la catégorie Unlimited, qui s’ajoute à une médaille d’argent aux championnats d’Europe et de France Advanced. Cette année, trois dates sont cochées dans le calendrier du Cherbourgeois. A commencer par les championnats de France début juillet, suivi de l’Open de France un mois plus tard. Et enfin les championnats d’Europe, en Italie du 8 au 16 septembre. « Je n’ai jamais vraiment visé une place. J’espère faire la meilleure prestation. J’ai toujours visé le top 5, c’est quelque chose de faisable. Même quand j’ai gagné le championnat du monde, je me suis dit je vais viser le top 5 et après je laisse les juges se débrouiller. Je veux faire en sorte de ne pas avoir de regrets. Si j’estime avoir fait un beau vol et que les juges disent que ce n’était pas terrible ou que les notes ne sont pas à la hauteur de ce que j’estime, je me dis que j’étais au max et que c’est vraiment à eux de se débrouiller« , assure-t-il.
Aujourd’hui, l’homme aux plus de 920 heures de vol voit grand, et espère inscrire son nom sur le toit de l’Europe.
Romain Ales
Crédit photo : Midi Pyrénées Voltige DR