JEUX OLYMPIQUES – Sarah Hanffou : « Finir ma carrière à Paris, c’est vraiment le rêve »
Sarah Hanffou, 38 ans et pongiste internationale camerounaise, s’apprête à disputer ses troisièmes Jeux olympiques cet été à Paris. Après 22 ans de carrière professionnelle, ces JO seront sa dernière compétition avant de ranger définitivement la raquette.
Le 25 juin dernier, Sarah Hanffou, pongiste professionnelle et internationale camerounaise, a, pour le plus grand plaisir d’une vingtaine de licenciés de l’Amiens Sport Tennis de Table, effectué quelques échanges. Pendant près d’une heure, elle s’est confiée sur sa riche carrière, mais aussi sur sa double nationalité, avant de disputer les Jeux de Paris 2024, qui seront ses derniers…
Entre Sarah Hanffou et le tennis de table, c’est une histoire d’amour qui débute très tôt, à l’âge de huit ans. Née à Roubaix dans le Nord de la France, elle découvre la pratique à l’école avant d’intégrer un club : l’ASPTT de Lille (aujourd’hui appelé Lille Métropole Tennis de Table, ndlr). « J’ai tout de suite accroché. Je me suis énormément entraîné et tout est allé vite ensuite. C’est un sport qui est très rapide et qui nécessite quand même une réflexion. Il y a une dimension intellectuelle et stratégique, c’est quelque chose que j’adore. Chaque match est différent parce que chaque joueur est différent, il faut s’adapter » confie Sarah.
Repérée par la Fédération française, elle part pour la Chine à l’âge de 12 ans, d’abord pour un mois puis pour une période de six mois. Quoi de mieux comme pays que l’Empire du Milieu pour progresser dans le Ping, considéré là-bas comme une religion. À son retour en France, Sarah Hanffou intègre le CREPS de Wattignies, un centre de performance permettant d’allier études et performance sportive. Puis, à seize ans, elle rejoint l’INSEP.
En parallèle de son ascension dans le tennis de table, Sarah Hanffou effectue des études de droit pour devenir avocate. Diplômée depuis plus de dix ans, la pongiste voit de nombreuses similitudes entre son activité professionnelle et sa carrière de sportive de haut niveau : « On fait les choses à 100 %, un dossier ou un match. Si on le gagne, tant mieux, si on le perd, on apprend et on passe à autre chose. Je fais toujours les choses à 100 %, jamais à moitié, sinon autant ne rien faire. Le mental aussi rentre beaucoup en ligne de compte. Il faut garder la tête froide ».
En plus de ces deux activités, l’ancienne joueuse de Quimper en Pro B doit aussi jongler avec la vie de famille. Une chose pas évidente et qui implique forcément des sacrifices. « J’ai dû renoncer à beaucoup de moments avec la famille et les amis, ça, c’est sûr. Je vais pouvoir savourer après la retraite, sourit-elle. Pour toutes mes activités, j’essaie d’être le plus focus possible. Quand je suis au Ping, je suis au Ping. Quand je suis au cabinet, je suis au cabinet, et quand je suis en famille, je coupe tout et je profite d’être en famille. Je vis les choses intensément, je suis beaucoup plus sur la qualité que sur la quantité. »
Sarah est aussi une athlète engagée avec ce projet monté en 2010 avec plusieurs pongistes de l’équipe de France : Ping Sans Frontières. « C’est vraiment un projet qui me tient à cœur », précise-t-elle. J’ai eu un déclic lorsque j’avais pu retourner sur le continent africain, au Nigéria, avec l’équipe de France. Certains Nigérians n’avaient même pas de raquette pour jouer. Avec plusieurs amis de l’équipe, on a commencé à collecter du matériel, c’est comme ça que ça a débuté. » Aujourd’hui, l’association, dont elle est présidente, fait d’incroyables dons, les urnes dans les clubs pour récupérer du matériel sont pleines. Avec Cornilleau, qui est aussi son équipementier, « on peut vraiment développer la pratique du tennis de table dans le monde, au niveau amateur comme professionnel. »
Sarah Hanffou, une athlète olympique et engagée
Cet été, du 26 juillet au 11 août, Sarah Hanffou s’apprête à participer à ses troisièmes Jeux olympiques après Londres en 2012 et Tokyo en 2021. Quand la pongiste y repense, elle s’amuse à dire qu’elle n’y pensait pas du tout étant plus jeune. « Ça a été étape par étape, Je ne rêvais pas forcément, juste je kiffais jouer (sic), avec les copines et en club. Puis, ça se fait de manière automatique, alors oui, il y a du travail, mais dès qu’on atteint les grosses structures comme le CREPS de Wattignies et l’INSEP, on est entouré de sportifs, donc ça se fait assez naturellement. Les Jeux, c’est vraiment quelque chose de particulier. Il y a des grands sportifs, mais aussi des joueuses meilleures que moi qui n’ont jamais réussi à y participer, ou manqué leur qualification. »
Ces Jeux de Paris 2024, Sarah n’avait, au départ, pas vraiment prévu d’y participer, du moins de tenter sa chance pour y être. À bientôt 38 ans, la Franco Camerounaise souhaitait prendre sa retraite sportive après les Jeux de Tokyo. Elle raconte : « J’ai pris un peu de temps pour réfléchir, sûrement un peu trop (rires) et je me suis dit qu’il faut que j’y sois et que je range la raquette à Paris. Je me disais que c’était finir où tout avait commencé, avec l’INSEP et l’équipe de France. J’ai une histoire particulière avec la France : ma mère est Française, mon père est Camerounais. J’ai d’abord joué avec l’équipe de France avant d’évoluer avec le Cameroun. Alors participer aux Jeux sous les couleurs camerounaises à Paris, c’est juste dingue. Finir à Paris, c’est vraiment le rêve. »
Durant ses 22 ans de carrière, Sarah Hanffou a remporté pas moins de 150 médailles. Elle a notamment remporté les Championnats d’Afrique de tennis de table, organisés au Cameroun en 2010. Neuf ans plus tard, en 2019, elle s’offre une belle médaille d’argent aux Jeux Africains. Dans un peu plus d’une semaine, à l’Arena Paris Sud, vêtue de son maillot rouge (ou vert selon l’adversaire, ndlr), confectionné spécialement pour l’occasion par Cornilleau, Sarah Hanffou tentera de réaliser sa meilleure performance aux Jeux, à savoir passer le deuxième tour de la compétition avant de « ranger définitivement la raquette », comme elle aime à dire.
César Willot
Crédit photo : Théo Bégler – Gazette Sports