PORTRAIT – Zahir Zerdab : « Quoi qu’il arrive, le football restera toujours ma passion »
Zahir Zerdab est un homme simple dans la vie de tous les jours. Sans complexe, l’Amiénois de 41 ans s’est confié sur sa vie et sa carrière de footballeur pleine de rebondissements. Il a surtout réalisé le rêve de beaucoup d’enfants, devenir footballeur professionnel…
Né à Amiens, Zahir Zerdab commence très tôt la pratique du football, d’abord du côté de l’ASM Rivery avant de rejoindre l’US Camon à l’âge de neuf ans. Là-bas, il y reste une dizaine d’années, où il évolue même pendant deux
saisons avec les séniors. Passionné de football, il a quelques idoles, Marco Van Basten, Ronaldo le brésilien, ou encore Zinedine Zidane, « c’est un vrai modèle, il a été exceptionnel, on n’en voit plus des joueurs comme ça. » Pas destiné à devenir footballeur professionnel, l’Amiénois poursuit ses études, « pour ma mère il était hors de question d’avoir le bac et de partir dans des centres. A l’époque, la mode était de faire de longues études, j’étais pris à Compiègne en école d’ingénieur. » Finalement, il opte pour des études STAPS, lui permettant d’avoir des ménagements en étant considéré comme sportif de haut niveau. Trois ans plus tard, il obtient sa licence, « c’est à partir de ce moment-là que je me suis vraiment épanoui, je me suis dit qu’au cas où ça ne marcherait pas dans le foot, je pourrais retourner dans une vie plus classique. »
Son arrivée dans le monde professionnel s’est faite petit à petit. Chaque saison, Zahir Zerdab, grimpait d’une division, passant de Camon, en Promotion Honneur (Régional 2 d’aujourd’hui, ndlr) à l’US Roye avec qui il monte en CFA, puis en National, « on est redescendu, j’ai signé à Beauvais puis en pro au Stade de Reims en Ligue 2, ça a continué à monter et je suis parti en D1 Belge au SV Zulte Waregem. »
Départ pour l’Algérie
« J’avais signé à Reims en étant blessé, je signe en Belgique où ça ne se passe pas très bien non plus », avant de recevoir une offre venue d’Algérie, de la Jeunesse Sportive Madinet Béjaïa (JSMB), un club qui dispute régulièrement la Ligue des Champions africaine et la Supercoupe du Maghreb. L’Amiénois saisit l’opportunité et quitte le Vieux continent pour son pays et sa ville d’origine. Au sein du JSMB, Zahir Zerdab prend part à 77 rencontres pour 22 buts inscrits, « je suis régulièrement dans les équipes et je deviens international. »
Ça veut dire qu’à un moment dans ma carrière, sur peut-être trois millions de footballeurs algériens, j’ai fait partie des 20 meilleurs. C’est un rêve pour beaucoup
Zahir Zerdab
Zahir Zerdab devient international algérien
Auteur d’un bon début de saison avec le club, Zahir Zerdab se révèle aux yeux des Algériens. C’est logiquement qu’il
est appelé avec la sélection A’ (équipe des joueurs algériens qui évoluent dans le championnat local, ndlr). Lorsqu’il est sélectionné par Abdelhak Benchikha, il ressent de la fierté : « J’ai repensé cinq ans en arrière où j’étais sur un lit d’hôpital avec ma fracture du tibia péroné. On m’a dit que ça allait être très compliqué de rejouer. […] C’est le summum, ça veut dire qu’à un moment dans ma carrière, sur peut-être trois millions de footballeurs algériens, j’ai fait partie des 20 meilleurs. C’est un rêve pour beaucoup ». Zahir Zerdab dispute même un match avec la sélection algérienne face au Luxembourg en novembre 2010.
L’aventure avec le JSM Béjaïa se termine mal puisque le club refuse de le laisser partir en Turquie. Frustré, le footballeur saisit la première opportunité qu’on lui tend pour quitter le club, et signe à Rouen. Après deux ans passés en Normandie, le club doit monter en Ligue 2, mais est finalement rétrogradé administrativement, « ZZ » change encore d’horizon. Âgé de 31 ans, le natif d’Amiens retourne dans le pays des fennecs et rejoint Constantine avant de signer au Mouloudia Olympique Béjaïa, club voisin du JSMB. Avec le MO Béjaïa, « on finit deuxième du championnat, je finis meilleur buteur et je marque en finale de la Coupe d’Algérie. »
Un souvenir inoubliable
Quand on demande à Zahir Zerdab de nous faire part de son souvenir le plus marquant dans sa carrière professionnelle, il met quelques instants avant de faire son choix. Il décide de raconter la finale de la Coupe d’Algérie disputée avec le MO Bejaïa face au RC Arbaâ au stade Mustapha-Tchaker de Blida en 2015 : « On savait qu’on pouvait écrire une page importante du club. Gagner la Coupe d’Algérie, c’était mieux que de remporter un championnat. Il y avait une vraie ferveur autour de ce match, des personnes ont dormi deux jours devant le stade pour avoir une place. » Il raconte même une anecdote amusante la veille de la finale, « je disais à mon camarade
de chambre : ma femme est en train d’accoucher, ce serait bien que je marque demain, pour faire une célébration, à la Bebeto à l’époque, en marquant un but simple pour une fois, en mettant une petite pointe. » Ironie du sort, l’Amiénois inscrit l’unique but de la rencontre, « sur une passe en profondeur, je devance le gardien en touchant le ballon du bout du pied, je marque et on gagne la finale 1-0. C’est le top du souvenir parce que après il y a la promenade avec le car ouvert, le public, et on a marqué l’histoire du club. »
Deux saisons réussies au MO Béjaïa lui permettent de rejoindre « le plus gros club d’Algérie », le Mouloudia Alger.
Ces quatre années sont « clairement les meilleures années de ma carrière, si j’avais pu partir plus tôt je l’aurais fait, mais à l’époque, il fallait vraiment prouver niveau par niveau avant de signer professionnel. »
Lorsqu’on lui demande de décrire sa carrière de joueur de football, il choisit le mot « honorable », il n’était « pas le
meilleur de ma génération, je me disais que je pouvais y aller mais je n’étais pas obnubilé par ça. » L’Amiénois de 41 ans a marqué, à son échelle, l’histoire du football, « même à un bas niveau c’est super important », devenant également le premier buteur de l’histoire du championnat professionnel algérien : « On est content parce qu’on le voit dans les journaux, et on en reparlera peut-être dans cinquante ans, c’est toujours bien de marquer son passage. »
Après le football, la vie continue
Aujourd’hui, Zahir Zerdab « n’attend plus rien du foot », en clair le football lui a tout donné et inversement. Mais « quoi
qu’il arrive, le football restera ma passion. » Depuis 2017, il évoluait à Camon puis à l’AC Amiens la saison dernière, à
l’issue de laquelle il a souhaité arrêter. « C’était un stop mais pas du cœur. J’avais aussi envie de prendre du temps avec ma famille, mes enfants grandissent, malgré tout, le football, ça prend du temps. Je me suis toujours dit, le jour où j’arrête d’être pro je m’occupe de mes enfants pour aider ma femme. » Il évoque l’importance de cette dernière dans sa vie, « c’est important de s’appuyer sur la personne qui partage ta vie. Ta réussite footballistique est aussi due au fait que cela se passe bien chez toi, il faut avoir une femme qui partage ta vie pour ce que tu es, pour tes valeurs, pour tout et je sais que ma femme s’est sacrifiée pour moi. »
À côté de sa pratique du football amateur, Zahir Zerdab a monté une société, H2Z, avec son frère, basée sur Camon
et spécialisée dans la transaction immobilière. Récemment, avec son beau-frère, il a ouvert une boîte dans le domaine du bâtiment. Finalement, après avoir été convaincu par Frédéric Bornoville, l’entraîneur de l’US Camon, Zahir Zerdab décide de rechausser les crampons pour aider son club de cœur et formateur. Un retour réussi puisque l’Amiénois empile les buts et participe notamment à la belle et historique aventure en Coupe de France où l’US Camon égale son record en se hissant jusqu’au 7ème tour : « Je suis très bien entouré, on a une très bonne équipe avec de très bons jeunes. Je joue avec des joueurs qui jouent presque pour moi, je suis très reconnaissant de tout ça, je me sens impliqué. Ça reste mon âme de compétiteur, quand je m’engage dans quelque chose et que je dis que je vais le faire un peu en dilettante, je me force quand même d’avoir cette rigueur et d’aider quand on a besoin de moi. »
Vous pouvez également découvrir l’entretien dans la vidéo ci-dessous :
Interview : César Willot, Léandre Leber
Rédaction : César Willot
Crédit photo : Kevin Devigne, Louis Auvin – Gazette Sports