MONDE FEDERAL – Entretien exclusif avec Frédéric Paquet, président de la FFFA
La nouvelle est tombée et a secoué le milieu du football américain. Après 26 ans d’existence, les Pôles France fermeront leurs portes à l’issue de la saison. Une tristesse quand on sait qu’à Amiens, le Pôle France Révolution est un des acteurs majeurs de ce sport encore peu connu du grand public et cela depuis 1999.
Le président de la fédération de football américain (FFFA) Frédéric Paquet explique la raison derrière la fermeture des Pôles : « Le statut de haut niveau est perdu pour le foot américain, officiellement depuis le 2 janvier 2025. Donc, dans la foulée, naturellement les pôles foot américain n’existent plus. » Cette perte de statut était en suspension depuis déjà quatre ans. En effet, le ministère avait laissé une chance à la discipline, mais pour réussir à conserver ce statut de haut niveau, il faut la présence de Championnats du monde, or ce n’est pas le cas. Cela aurait pu être compensé par un classement au niveau européen parmi les trois premiers, mais là aussi, l’équipe de France n’est pas dans les clous. « Après avoir réussi à sauver sa peau il y a quatre ans, ce n’était pas possible et donc ça s’est arrêté » regrette Frédéric Paquet. La perte de ce statut entraîne « de facto la cessation des activités des pôles à la fin de l’année scolaire et de la saison. Malheureusement, c’est aussi simple que ça. »

Dès maintenant et depuis plusieurs semaines, la fédération travaille afin de trouver des solutions d’avenir aux jeunes membres des pôles pour la saison prochaine. Concernant ces réflexions sur l’avenir, les encadrants sont bien évidemment l’un des sujets abordés, car quid des salariés ? « Tout va dépendre de la solution des projets que l’on va avoir ensemble, mais il n’y a pas de décision prise actuellement. On est en train d’étudier les différentes possibilités« nous confiait le président de la Fédération. En effet, une reconversion professionnelle ne se fait pas vraiment du jour au lendemain. La disparition de ce statut entraîne également la disparition des équipes de France de football américain, par un manque de moyens financiers, regrette Frédéric Paquet : « C’est un programme qui coûte très cher et déjà avec les subventions du ministère, quand on était sport de haut niveau, c’était très compliqué d’avoir un programme cohérent, mais là, sans les subventions du ministère c’est impossible en fait. » Le président dresse un constat assez pessimiste de cette situation : « Le ministère n’a fait que confirmer une réalité qui fait qu’aujourd’hui le haut niveau du foot américain était très moyen et que pour pouvoir reconstruire ce haut niveau il faut repartir par la masse. »
Redynamiser la pratique en misant sur les jeunes
Si le nombre de licenciés au sein de la fédération augmente petit à petit (30 000 licences) la priorité est mise sur les jeunes afin de relancer une dynamique. Certes, avoir un team France fait rêver, mais cela « ne vous apporte pas de nouveaux licenciés » regrettait Frédéric Paquet. Actuellement, le discours est assez pragmatique du côté des instances du football américain : « Pour avoir des joueurs et des licenciés il faut déjà avoir des compétitions, il faut avoir des éducateurs formés, compétents et il faut qu’il y ait une vraie priorité de la part des clubs d’aller chercher des jeunes. C’est comme ça qu’on aura des jeunes et quand on aura de la masse, une vraie masse il sera toujours temps de reparler du haut niveau. »
Le ministère n’a fait que confirmer une réalité qui fait qu’aujourd’hui le haut niveau du foot américain il était très moyen et que pour pouvoir reconstruire ce haut niveau il faut repartir par la masse.
Frédéric Paquet, président de la FFFA
Il faut donc redévelopper les parcours de formation, continuer à multiplier les compétitions tout au long de l’année, à moindre coût, pour créer une dynamique positive auprès des jeunes pousses. Mais pour réussir à insuffler un vent nouveau, avoir le soutien des clubs est primordial. Afin d’obtenir cette aide, Frédéric Paquet a pour objectif de structurer les ligues, afin d’aider au développement local et territorial. Une hausse de l’investissement local pour créer une base solide avec l’optique de dépasser les 30 000 licenciés et de viser les 50 000 d’ici quatre ans.

Seul hic, on pourrait supposer qu’une partie du budget auparavant alloué à l’équipe de France soit reversé vers les clubs, mais encore une fois, cela bloque au niveau du ministère. L’allocation de ce budget se fera vers une autre discipline de la fédération, le flag football. Nouvel enjeu car nouvelle discipline olympique à Los Angeles en 2028 (porté par Pierre Trochet, Président de l’International Federation of American Football), le ministère décide d’investir, à seulement trois ans de la prochaine olympiade : « Les subventions qui étaient fléchées pour le foot américain vont être fléchées pour le flag et son équipe de France. »
La logique voudrait que les pôles actuels soient reconvertis en passant du foot us au flag football. Mais, encore une fois, « il s’avère que, malheureusement, les coûts sont trop élevés. » Même si cela avait vu le jour, le terme pôle France n’aurait pu être utilisé, cela aurait été un pôle Espoir. « Aujourd’hui les subventions ministérielles vont en s’amenuisant, donc nous n’avons pas les moyens, au niveau fédéral, de pouvoir entretenir un programme complet dans un nouveau pôle. »
Le développement du flag football
Le développement territorial abordé précédemment concernerait les trois disciplines de la FFFA : le football américain, le cheerleading et enfin le flag. Là où le dernier sport cité à un avantage de par sa présence aux Jeux olympiques de Los Angeles en 2028, bénéficiant ainsi d’un axe spécifique « avec la tentative de qualification », les deux autres branches devront compter sur les clubs pour réussir à se développer à plus grande échelle. La participation aux JO de l’équipe de France semble faisable, car les Tricolores sont bien classés. L’équipe masculine est 5e mondiale, tandis que l’équipe féminine est 11e mondiale. Il faut donc « continuer à accompagner le développement qui se fait pour l’instant naturellement. […] On est en train de les aider pour mieux structurer les compétitions, être plus efficace et développer les formations. »

Par contre, il n’est pas question de considérer le flag comme un renouveau du foot US, car « ce sont des disciplines différentes. » Si cette discipline profite de son statut de sport olympique, le football américain « repart sur une autre dynamique. » Principalement au niveau territorial avec par exemple la mise en place de la FFFA TV, site rediffusant l’intégralité des rencontres de la première division, ou encore une relance des compétitions de jeunes.
Le football américain est semble-t-il en manque de vitesse. Logiquement, le statut de haut niveau disparait pour ce sport, et la fédération cherche de nouvelles pistes pour re-insuffler de la vie. Attendons quatre ans pour faire le bilan des initiatives de la fédération, en espérant que d’ici-là, la France réalise une performance remarquable aux JO et que la popularité du football venu d’outre-Atlantique connaisse un boom pour obtenir de nouveau le statut fraichement disparu.
Cyprien Baude
Crédit photo : FFFA – DR | Théo Bégler & Kevin Devigne – Gazettesports.fr