ÉDITO : Encore un long chemin pour l’égalité
Les dernières semaines ont prouvé que si la lutte contre l’homophobie commence à être prise en compte dans le monde du football, il y a encore du travail à faire.
Le 17 mai dernier, c’était la Journée mondiale contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie. Un événement dont s’est saisi la Ligue de Football Professionnel. Au menu notamment, un flocage des maillots de L1 et L2 aux couleurs de l’arc-en-ciel.
Si l’initiative a été suivie par les acteurs du football français, dans l’ensemble, une défection fait parler depuis, celle d’Idrissa Gueye, milieu de terrain du Paris SG. Ce n’est certes pas la seule absence, mais celle-ci, motivée par des raisons personnelles, et ce après avoir déjà prétexté une gastro-entérite la saison dernière, sème le trouble. Surtout que le joueur semble, depuis, incapable de s’expliquer sur cette absence et, pire encore, le président sénégalais Macky Sall est déjà monté au créneau pour le défendre, en avançant un choix religieux.
Une prise de position qui interpelle. D’autant que l’on pourrait, au contraire, reprocher à la LFP un engagement faible. Peinturlurer les maillots d’un arc-en-ciel n’est pas vraiment de nature à éradiquer l’homophobie dans le football. Refuser de porter un arc-en-ciel sur le dos montre un jusqu’au-boutisme franchement pas rassurant sur l’état des mentalités. On n’a pas demandé à Idrissa Gueye un discours vibrant à l’ONU en faveur des droits des personnes LGBT !
Reste que cela a le mérite de clarifier les choses dans un monde d’hypocrisie. Car il suffit de voir la défense d’Abdou Diallo, son coéquipier au PSG, pour se rendre compte que la prise de position d’Idrissa Gueye ne choque pas, y compris parmi les joueurs qui ont porté les fameux maillots. Quant à la réaction du club champion de France, elle serait presque rassurante : « Le PSG a toujours tenu à combattre toute forme de discrimination et l’a de nouveau fait ce week-end » … si le club n’était pas propriété de QSI, fondé par l’émir du Qatar, qui prévient que les homosexuels seront acceptés à la Coupe du Monde de novembre prochain… à condition de ne pas afficher leur orientation sexuelle.
Une situation symbolique mais qui ne représente que l’iceberg de comportements problématiques et le plus souvent même plus réellement conscients, que l’on retrouve sur de nombreux terrains, amateurs compris, du « pédé » asséné à un adversaire à l’injonction de ne pas être des « tapettes ».
Autant dire que si la LFP s’est saisie de la problématique, cela reste encore timide et rencontre des résistances. Et si le coming-out de Jake Daniels, attaquant de D2 anglaise est une bonne nouvelle, le fait qu’il s’agisse du premier d’un joueur en activité outre-Manche depuis 32 ans et Justin Fashanu, qui s’était suicidé suite à une violente campagne homophobe, montre que l’on est encore seulement au début du chemin.
Morgan Chaumier
Crédit photo : Kevin Devigne – Gazette Sports