MIXITÉ : Le korfbal, un sport, une famille
Cousin confidentiel du basket, le korfbal est pourtant dans l’air du temps : seul sport collectif mixte avec, sur le terrain, autant de femmes que d’hommes. À Amiens, les Salamandres développent un esprit d’équipe familial.
Créé aux Pays-Bas au début du XXème siècle mais encore méconnu, mes équipes comptent autant de filles que de garçons. Mon but est de mettre le ballon dans un panier. Je suis, je suis… Le korfbal !
Ce sport – à prononcer korfballe – doit son implantation à Amiens à deux copains, qui se sont connus étudiants en STAPS. Un quart de siècle plus tard, l’amitié entre Frédéric Pereira, responsable de l’antenne d’Amiens des Salamandres, et Nicolas Gonthier saute toujours aux yeux ce mardi soir, jour d’entraînement au gymnase du lycée de Luzarches.
« Ce n’est pas un avantage d’être un homme (…). Ni un inconvénient »
Nicolas Gonthier, président de l’ASK Les Salamandres
Nicolas Gonthier, président de l’Association Sportive Korfbal Amiens, l’ASK Les Salamandres, est « enseignant en primaire, ma femme aussi. Les valeurs éducatives du korfbal sont très prenantes, comme la mixité parité, avec 4 filles et 4 garçons par équipe. Aucun genre ne domine. Ce n’est pas un avantage d’être un homme ou une femme. Ni un inconvénient. Chacun apporte ses qualités. » Car « les contacts non maîtrisés sont interdits. Les hommes défendent sur les hommes et les femmes sur les femmes. »
« On veut aussi se positionner sur le fait que les poupées ne sont pas réservées aux filles et les petites voitures aux garçons. Je le vois dans mon école élémentaire : des filles jouent au foot et des garçons font de la corde à sauter. Nos joueurs collégiens nous ont dit qu’à la récré, les filles et les garçons qui discutent et jouent ensemble, ce sont souvent ceux qui font du korf. Ils ouvrent leur état d’esprit, vont vers celles et ceux qu’ils apprécient, sans se soucier du genre.
C’est incroyable, vraiment, ce qu’apporte la mixité !
Anne-Sophie Chrétien, joueuse des Salamandres
Parce que, enchaîne Nicolas, le korfbal vient au départ d’un enseignant (néerlandais, en 1902, ndlr) qui souhaitait faire jouer ensemble tous ses élèves. Après, en adultes, c’est très compliqué de faire venir les femmes. Il faut qu’elles aient déjà connu le korfbal ou alors qu’elles vivent avec quelqu’un qui y joue. »
D’ailleurs, le président pratique avec son épouse. « On s’est connus à la fac où on a découvert le korf. On est devenus potes et après on s’est mariés. » Frédéric Pereira, lui aussi, est en couple avec une joueuse, Anne-Sophie Chrétien. Elle faisait juste « du step et du renforcement musculaire au club. Puis je suis allée voir le korfbal par curiosité et j’ai adoré dès le début ! La mixité, la parité, l’ambiance, le fait qu’il n’y a pas trop d’esprit de compétition, même si j’ai assez vite joué avec l’équipe. Et que j’ai la gagne ! On veut prouver, en tant que filles, qu’on peut le faire. C’est incroyable, vraiment, ce qu’apporte la mixité ! »
Mais aux vestiaires, c’est évidemment « chacun de son côté. Et pour les matchs, s’il n’y a pas 4 vestiaires, on se mixe avec les adversaires. Et c’est aussi une valeur du korf, insiste le président : « le respect. Sur le terrain, on peut pas se sentir (il sourit) et dans le vestiaire, on est ensemble. Souvent, on mange aussi tous ensemble. Quand on reçoit une équipe, elle est invitée à manger » et, embraye Frédéric Pereira, « ça fait partie de ce qu’on aime dans le korfbal. »
Le « korf » en Picardie : une famille avec deux papas
Pratiquement tout le budget du club, près de 10 000 €, va aux déplacements. « Heureusement que les collectivités comme Amiens Métropole et le Pays du Valois dans l’Oise, nous aident, avec les infrastructures » poursuit Nicolas Gonthier. Car la particularité de l’ASK Les Salamandres est d’être basée à la fois à Amiens et à St Omer-en-Chaussée, au nord de Beauvais où vit le président, également joueur : « Tant que je peux, je continuerai. J’ai 43 ans et Frédéric 45. On joue encore en première mais les jeunes qu’on forme depuis 2016 arrivent… »
L’équipe une évolue depuis deux ans en Excellence, le 2ème niveau national après avoir longtemps joué en Élite. Et la réserve en Honneur Nord « avec de gros déplacements aussi, jusqu’à Châteauroux, précise Fred Pereira. L’an dernier, j’en ai fait 7 à Saint-Étienne, avec les jeunes, avec l’équipe première… C’est une passion, une famille aussi. J’ai redécouvert le korf avec l’UFOLEP avant qu’on rejoigne la Fédération française. J’ai ramené d’abord les copains, puis la famille. Mais à nos âges, avec Nico, on sent quand même la fatigue monter. »
Une chose est sûre, les deux « pères fondateurs » du korfbal dans la région resteront au bord du terrain. « Avant j’étais président, maintenant je suis responsable de la zone d’Amiens, explique Frédéric Pereira. On est entraîneurs des petits, coachs, arbitres. Je suis aussi secrétaire de l’association. » La famille korfbal n’est pas près de perdre ses deux papas picards.
Vincent Delorme
Crédit photos : Kevin Devigne (Gazette Sports)